Le château Károlyi, en Hongrie, a accueilli l’ACCR et plusieurs membres du réseau du 17 au 21 avril 2023 afin de réfléchir collectivement aux enjeux du développement durable dans le domaine culturel et patrimonial. Ce séjour apprenant est venu clôturer le cycle de quatre rencontres européennes organisées en partenariat avec l’Abbaye aux Dames.
En tant qu’institution culturelle en prise avec l’histoire et l’évolution du territoire ainsi qu’avec les habitant.e.s et les visiteur.euse.s, les CCR sont attentifs à leur environnement proche et aux préoccupations qui lui sont liées. Le dérèglement climatique constitue un enjeu sociétal et environnemental dont se sont emparés les CCR afin de sensibiliser l’opinion publique.
Les CCR sont soucieux de questionner leurs pratiques afin de limiter leur impact, voire d’avoir un impact positif, sur l’environnement. Les Centres souhaitent accentuer cet engagement et le partager aussi bien avec l’ensemble des équipes internes, qu’avec les partenaires extérieurs et les publics. Pour envisager un changement durable des pratiques, il convient d’impliquer l’ensemble des acteurs d’une même chaîne.
/Faire du développement durable un projet de structure
Adapter son fonctionnement/
Les discussions menées ont fait apparaître le fait que pour soutenir le développement durable d’une organisation culturelle, il faut que les mesures soient prises à l’échelle de la structure et non pas seulement à l’échelle de quelques employé.e.s engagé.e.s. Il s’agit de changer les habitudes globales, le tout selon une structuration définie et encadrée par le site.
Cela peut passer par le repositionnement de l'offre en s’inscrivant dans une dynamique de slow tourism, par exemple en se rapprochant d’autres acteurs du territoire pour créer des "pack de visite" incitant les visiteur.euse.s à rester dans la région. Cela demande un travail de coopération et de définition de son offre pour présenter une complémentarité avec les autres acteurs touristiques du territoire. C’est notamment le tournant envisagé par l’Abbaye aux Dames qui serait incluse dans les offres de son Comité Départemental du Tourisme de rattachement.
Les sites font également appel à des prestataires extérieurs sur lesquels l’emprise est moindre. Néanmoins, le choix d'un prestataire est, dans une certaine mesure, le reflet des engagements de la structure. Dans un souci de cohérence, les Centres peuvent instaurer des chartes d’achats et de fournisseurs afin de correspondre à leurs engagements.
Sensibilisation interne des équipes/
Pour poursuivre dans une dynamique globale, il convient d’impliquer l’ensemble des salarié.e.s en les sensibilisant et en les encourageant à adapter leurs habitudes. La Saline royale participe au challenge mobilité qui invite les équipes à utiliser les mobilités douces pour se rendre au travail le temps d’une semaine. Il y a ensuite un classement inter-entreprises au sein de la communauté de communes.
Des systèmes de prime et de réduction peuvent s’envisager dans le cas de déplacements fréquents en transport doux. Des abonnements privilégiés avec la commune pour la location de vélo par exemple sont aussi des solutions possibles.
/Transmettre ses engagements aux publics
Le rôle de la programmation/
La programmation artistique mais aussi des activités de sensibilisation spécifiques proposées par les CCR sont des moyens de les sensibiliser voire de les mobiliser sur les questions écologiques. Le festival Look up, construit par les jeunes pour les jeunes en immersion dans le futur et coordonné par la Saline royale d’Arc-et-Senans illustre cette ambition. L’association Belle rive a quant à elle mis en place des activités autour d’un rucher pédagogique afin notamment de casser les appréhensions autour des insectes chez les enfants. Cela permet de les familiariser avec la biodiversité et de mieux appréhender son importance.
La médiation sur site peut aussi permettre d’accompagner le visiteur ou la visiteuse dans son expérience sur place et de faire comprendre aux publics quels engagements sont revendiqués par le CCR.
La question du récit/
En tant que structure culturelle ouverte, les CCR ont une responsabilité par rapport à la société. Ce sont des lieux de culture dans lequel s’affirment des messages politiques, des choix de développement. Les CCR peuvent devenir des lieux de revendication, il s’agit alors de choisir ce qu’on souhaite promouvoir par ses actions, mais aussi par l’image et le récit qu’on donne de soi.
Rendre l’écologie désirable et transformer le discours en un discours positif qui encourage à l’action plus qu’il ne déplore les dégâts est un défi auquel se confrontent les CCR. Cette construction d’un nouveau récit qui vise à passer le message de la préservation de la biodiversité dans un site patrimonial peut se faire en collaboration avec les locaux afin de développer leur pouvoir d’agir.
Transmettre ce récit peut demander de passer par d’autres voies de communication. Les traditionnels mailing ou autre communication digitale ne sont peut-être pas les plus appropriés. Des canaux de communication plus directs, en face à face et dans une démarche participative et non pas passive de réception de l’information, paraissent plus adaptés.
Inciter à des pratiques plus vertes/
Par leur posture de laboratoire d’expérimentation artistique et patrimoniale, les CCR ont les moyens d'être des acteurs de la transition écologique et d'influencer la sphère culturelle. Ils ont dans leur ADN cette volonté de faire bouger les représentations et les pratiques en place.
Les incitations peuvent être aussi bien explicites qu’implicites de la part des Centres. La Saline royale d’Arc-et-Senans invite les visiteur.euse.s à avoir recours à des moyens de transports collectifs ou à impact nul en précisant sur ses flyers que les lieux sont accessibles en train, en ajoutant des liens vers des plateformes de co-voiturage ou encore en précisant que le lieu est en mesure d’accueillir des vélos. De manière plus implicite, l’hôtel de la Saline rompt avec le souci de discrétion de l’hôtellerie quant aux éléments considérés comme disgracieux en mettant deux poubelles de tri dans les chambres et aussi dans les couloirs. Ces poubelles ont été faites en France et deviennent un objet design. Le site affiche ainsi son engagement pour un tri des déchets plus efficace.
Le centre social Belle rive, partenaire de l’Abbaye aux Dames, a aussi décidé de rendre le tri des déchets désirable et ludique par la création d’un bac complet de tri avec l’aide d’une plasticienne et à partir d’objets de récupération. Ce bac mobile permet de faire de la sensibilisation dans différentes structures.
Constater la cohérence entre les valeurs sur lesquelles communique le centre et la mise en place effective de mesures incite à la participation. Par exemple, le Festival des Pluies de Juillet demande aux festivalier.e.s de faire la vaisselle. Alors que l'on pourrait croire à une certaine réticence de leur part, ils et elles le font volontiers car cela correspond à l’image engagée portée par l’événement.
Dans cette démarche d’incitation il ne s’agit pas d’imposer ses convictions mais d’assumer ses positions en suscitant l’envie et la réflexion auprès des publics.