Remarques caustiques, dessins piquants, discours militants, memes ironiques. Comment l’humour a t-il évolué au cours de ces dernières décennies ? Le collectif artistique Slavs and Tatars assure le commissariat de l’exposition Crack Up – Crack Down, qui évoque la satire, son pouvoir et ses échecs.
Présentée pour la première fois à la 33e Biennale d’Arts graphiques à Ljubljana, et aujourd’hui reprise au château Ujazdowski Centre d’art contemporain, ce panorama de la satire comme genre graphique a été élargi pour aborder les nouveaux contextes polonais.
La satire est tout autant moralisatrice que critique : la fureur et la subversion sont dans sa nature. Elle peut moquer mais aussi terroriser. L’humour, bien sûr, évolue avec les changements politiques et les avancées technologiques. Il est bien connu que l’élan comique fleurit en particulier sous les régimes autoritaires : en témoigne la riche tradition d’humour communiste en Europe centrale et orientale, ou les nombreux exemples venant du Moyen-Orient. La satire peut aussi être un outil au service d’une idéologie, même si sa nature révèle (aussi) les mécanismes autoritaires. En ces temps de post-vérité, elle est un révélateur de l’humeur du public.
L’exposition présente des œuvres historiques et contemporaines, qui comportent des discours militants, des magazines satiriques et des productions universitaires. Slavs and Tatars n’a pas réduit l’art graphique à un simple rôle de « medium » mais lui accorde une capacité d’action. Au château Ujazdowski Centre d’art contemporain, le collectif présente un large florilège d’œuvres réalisées par des artistes slovènes, ukrainiens, géorgiens, bulgares mais aussi chinois, iraniens, britanniques et américains. Parmi les artistes polonais on retrouve Bolesław Chromry, Rafał Dominik, Jana Shostak et Jacqueline Sobiszewski.
« Avec la montée des populismes autour du globe (pour ne pas mentionner les formes d’identités politiques réductrices et revanchardes), il y a eu un vigoureux débat sur ceux qui constituent ‘le peuple’. Pendant plus d’un millénaire, la satire a été un genre particulièrement contesté pour aborder de tels enjeux, en parcourant tous les états, de l’invective sérieuse à la moquerie badine. Est-ce que chaque blague est, comme l’a soutenu George Orwell, une petite révolution ? Ou est-ce que le rire n’est qu’une soupape pour atténuer les pressions et tensions qui pourraient, sinon, conduire à des contestations de l’autorité politique ? » - Slavs and Tatars.