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Retour sur les Rencontres européennes (1) – Culture & transitions/

Retour sur les Rencontres européennes (1) – Culture & transitions

Rencontres européennes 2023/ Patrimoines & création face aux transitions contemporaines

Du 16 au 18 novembre 2023, l’ACCR a organisé les Rencontres européennes « Patrimoines & création face aux transitions contemporaines » à la Saline royale d’Arc-et-Senans. En partenariat avec le ministère de la Culture, la Saline royale, la FNCC ainsi qu’avec le Relais Culture Europe, l’ACCR a souhaité marquer ses 50 ans et réaffirmer l’identité spécifique du réseau des CCR : une approche durable, inclusive et innovante du patrimoine.

Pendant ces trois jours, le rôle de la culture comme moteur d’action, d’engagement et de changement a longuement été souligné. Soumise aux risques et aux défis contemporains, qu’ils soient d’ordre économique, environnemental ou social, la culture se réinvente et tend à proposer de nouveaux modèles. Les Rencontres européennes ont mis en avant l’interconnexion entre ces trois défis, les actions pour l’un n’allant pas sans répercussions pour les autres. Les travailler de concert apparaît nécessaire.

Ce cadre de réflexion reposait sur la définition de la culture telle qu’émise par l’Unesco : « La culture, dans son sens le plus large, est considérée comme l'ensemble des traits distinctifs, spirituels et matériels, intellectuels et affectifs, qui caractérisent une société ou un groupe social. Elle englobe, outre les arts et les lettres, les modes de vie, les droits fondamentaux de l'être humain, les systèmes de valeurs, les traditions et les croyances. »

Par leur capacité d’innovation, leur pratique quotidienne de la pluridisciplinarité et de la transdisciplinarité, les Centres culturels de rencontre se présentent comme des réservoirs de création et d’interculturalité. Ces multiples rencontres, humaines comme artistiques, témoignent des capacités infinies de réinvention du secteur au regard des préoccupations contemporaines.

 

Agir pour demain/

Face à une humanité diverse et à l’incertitude environnementale et économique, la culture, ses institutions et ses acteurs, réajuste ses perspectives, ce qui implique de mobiliser des outils stratégiques globaux tels que les dix-sept objectifs du développement durable. Les acteurs culturels sont un maillon d’un système régi par des réactions en chaîne.

Dans cette nouvelle manière de se penser, il convient d’envisager le changement à l’échelle systémique. Inclure dans son cadre de réflexion les limites planétaires, qui vont bien au-delà des questions climatiques et énergétiques, illustre cette dynamique. Cette approche globale demande de limiter aussi bien les impacts négatifs directs qu’indirects et de définir une stratégie d’impact positif pour atténuer et adapter les répercussions de ses actions.

Pour accompagner cette prise de conscience et aider au passage à l’action, le Shift project a défini quatre typologies de transformations à adopter : transparentes, positives, offensives et défensives.

La fresque de la renaissance écologique offre un chantier pour donner à voir le monde de demain : comment les activités humaines peuvent s’organiser dans un monde qui a réussi à rester sous la limite de 1,5ºC pour le réchauffement climatique ? Cet outil de projections rend visible les interconnexions entre secteurs économiques et les systèmes de valeurs. Il permet de penser à l’ensemble des possibilités d’action et, par conséquent, à la direction que l’on souhaite prendre dans une optique d’impacts positifs.

 

La force des récits/

Dans cette projection vers un futur désirable, soutenable, les acteurs culturels peuvent offrir des modèles à la reconstruction, au changement des trajectoires. De fait, les acteurs culturels portent en eux la capacité à modeler les imaginaires des sociétés grâce aux récits qu’ils composent et partagent.

Face à une crise de l’imaginaire qui valorise les dystopies et les discours pessimistes, la passivité collective face aux urgences climatique et sociale s’installe. Or, la culture permet de proposer de nouvelles images : qu’est-ce qui nous fait rêver, vers quoi on aspire à aller ? Imaginer là où on a envie d’aller offre la capacité de se projeter et d’agir dans ce sens.

L’espèce humaine est par nature fabulatrice, elle invente des histoires pour donner du sens à ce qui l’entoure. Les récits façonnent notre vision du monde, nos modes de vie et nos actions. Plus des modèles donnant envie de changer seront diffusés, plus notre conscience collective et nos comportements y concourront. La programmation et l’offre culturelle sont aptes à banaliser certaines crispations sociales qui relèvent davantage des effets que de la cause, permettant ainsi de se concentrer sur le noyau dur de la question et non pas seulement sur ce qui gravite autour. 

Œuvrer pour le changement implique de se focaliser sur les personnes qui se sentent peu concernées. Si cette frange de la population s’ajoute aux militant.es convaincu.es et imitent progressivement leur comportement, le point de bascule sociétale serait alors atteint permettant l’adoption massive et généralisée de nouvelles habitudes. Par la pédagogie qui émane du secteur, la culture peut grandement contribuer à atteindre ce point de bascule.

 

Faire du patrimoine des lieux accueillants/

L’Histoire a changé de lieu, elle ne s’écrit plus uniquement dans les musées ni par et pour une frange restreinte de la société. Au contraire, il existe de multiples lieux et manières de fabriquer les récits du passé. Les récits comme les patrimoines sont pluriels. Que le patrimoine soit monumental ou pas, matériel ou immatériel, il s’agit d’Histoire dans la mesure où il offre des racines communes. Le patrimoine permet de se sentir exister, enrichissant ainsi notre identité.

Par leur ouverture sur les préoccupations sociales contemporaines et leur programmation pensée de manière collaborative et/ou participative avec les habitant.es, les Centres culturels de rencontre apparaissent comme des lieux repères, des lieux où le débat est permis permettant d’éprouver la démocratie sociale.

Lieux privilégiés de rencontre et de collaboration entre les acteurs du territoire, les CCR permettent aussi la discussion des cultures grâce, notamment, à leurs programmes de résidences ouverts à l’international.

En somme, par leur approche innovante et démocratique du patrimoine, les CCR tendent à symboliser le passage de l’expression « le patrimoine est à nous » à « le patrimoine c’est nous ».

Cette remobilisation citoyenne, cet accent porté sur la capacité d’autonomisation et d’action de chacun trouvent un écho particulier dans les propos de Gaston Berger, philosophe du XIXe siècle : « Le futur n’est pas écrit, demain ne sera pas comme hier, il sera nouveau et il dépend de nous : il est moins à découvrir qu’à construire ».