Les Rencontres de Goutelas organisées par l'ACCR au château de Goutelas en décembre 2022 ont mis en avant une appropriation collective du patrimoine pour en faire une ressource partagée grâce à laquelle chacun.e peut s’exprimer. Grâce notamment aux balades autour du matrimoine de Goutelas, des discussions sur l’égale valeur des récits autour du patrimoine ont pu émerger, venant ainsi s’inscrire dans les applications concrètes de la Convention de Faro sur le patrimoine.
Afin de mieux saisir les multiples enjeux de cette convention européenne, Prosper Wanner, membre de communautés patrimoniales ainsi que de la coopérative « Les Oiseaux de passage », a été interviewé par le média communicant.info.
En guise de préambule, Prosper Wanner présente la Convention de Faro comme étant « la première qui ne s’intéresse pas à comment on conserve le patrimoine mais pourquoi on le fait : pourquoi on le fait pour la société, pour la promotion de la démocratie, pour le dialogue interculturel, pour le développement local ou la gestion des conflits. (…) Et c’est une convention qui reconnaît, dans ce cadre-là, le droit au patrimoine culturel, soit le droit de chacun de participer à la fabrique patrimoniale comme droit humain. »
/ Un patrimoine multiple pour faire humanité
Pour embrasser la vision du patrimoine tel que conçu par ces acteurs engagés pour les droits culturels, il faut s’éloigner d’une conception classique qui le limiterait au patrimoine bâti monumental. Le patrimoine se présenterait davantage au pluriel, en incluant ses dimensions naturelles et immatérielles.
« On parle du patrimoine dans une vision élargie. Ce ne sont pas uniquement les « grands monuments ». Mais on prend en considération tout ce qui relève des interactions entre personnes et le milieu dans lequel elles se trouvent. »
Au-delà de la nature du patrimoine, ce qui importe est sa capacité à fédérer et à créer des interactions qui sont nécessaires pour former et renforcer le sentiment de lien entre les Hommes.
« La reconnaissance de ces différents récits doit permettre de faire humanité ensemble. »
/ La reconsidération du public
L’implication et la revalorisation des publics constituent un élément clé de la Convention de Faro comme déjà abordé par Sarah Wasserstrom, chargée de la coordination, de la programmation et de l’action culturelle au château de Goutelas, dans un entretien mené également par le média communicant.info.
Cela passe par la reconnaissance des récits que chacun.e construit autour du patrimoine selon ses sensibilités ou bien son profil sociologique. Le fait d’élaborer et de répandre des discours alimente ce patrimoine et en crée un nouveau, intangible.
« La Convention de Faro reconnaît la diversité d’interprétation. On sort donc du récit unique, on peut avoir plusieurs interprétations. »
Au-delà d’encourager cette variété des récits, celle-ci fait partie du droit de tout un chacun d’émettre son avis ou bien son désaccord. Ces points de vue exprimés sont considérés à leur juste valeur et permettent une implication directe dans la prise de décision.
Ainsi, on ne s’adresse plus simplement à un public passif et interchangeable mais à des personnes considérées avant tout dans leurs qualités d’individu et de sujet (Axel Honnetth).
/ L'hospitalité envers l’environnement
Toujours dans un souci d’élargissement de la notion de patrimoine, la Convention de Faro ne fait pas de distinction entre le patrimoine culturel et le patrimoine naturel. Il s’agit de porter autant attention à l’un et à l’autre, sans primauté du culturel bâti par l’Homme.
Cette large acception permet de prendre en compte un territoire dans son entièreté, de le considérer comme un tout où chaque élément répond aux autres dans une logique d’interdépendance. Considéré comme un ensemble, il faut donc prendre soin de manière équitable de chaque composante de l’environnement.
Dans cette optique, des réflexions innovantes sont en cours sur l’inclusion des êtres vivants non-humains comme témoins et porteurs d’un patrimoine. Les soucis d’hospitalité chers à cette convention s’appliquent aussi au non-humain.
« Pour nous dans l’hospitalité, il y a un territoire avec différentes composantes : des lieux d’hébergements, des forêts, des champignons, des plantes. »
Pour lire l’interview de Prosper Wanner dans son intégralité, consultez cette page. Celle-ci a été réalisée par Cyril Leclerc, consultant-formateur et rédacteur sur le média du collectif Les Œuvres Vives.