Dans le cadre du programme Odyssée, YOWA NGOY Yollande, de son nom d’artiste Orakle Ngoy, a été accueillie en résidence croisée du 13 mai au 23 juin 2023. Artiste congolaise, elle a ainsi séjourné à Clarenza, la Bastide de l’oralité, en Nouvelle-Aquitaine, avant d’aller dans le petit village de Steinhöfel, en Allemagne, où s’est installée l’association artistique LandKunstLeben.
« Bien plus qu’une simple expérience nouvelle, j’ai vécu durant ce temps un épanouissement nouveau dans des espaces de travail et de création hors du commun. Au contact d’artistes aux talents incroyables, et au cœur d’institutions propices aux rencontres et aux découvertes culturelles, j’ai pu mettre à bien plusieurs échanges artistiques. »
Dans le cadre cette résidence, Orakle Ngoy développait un projet intitulé Carte Blanche qui mêle à la fois temps de recherche et de création autour de l’écriture, de l’oralité et du son. L’artiste a ainsi créé et interprété des textes poétiques par le biais du slam et du rap. Cette exploration des textes poétiques a demandé de mobiliser des références culturelles pour les adapter au mieux à une interprétation musicale. L’attention portée à l’univers du son consistait à comparer différents environnements sonores selon leur contexte historique de production.
L’ensemble des travaux de l’artiste et l’angle de recherche choisi sont irrigués par les théories féministes ainsi que par une réflexion sur les manières de s’approprier sa condition d’être humain. Dans cette démarche, l’artiste s’est inspirée des écrits de Virginia Woolf et plus précisément de son roman Orlando publié en 1928 dans lequel la primauté est donnée aux sensations qui composent notre être. De nombreux sujets sont également abordés parmi lesquels la nature de l'homme et de la femme, l'amour, la vie en société ou encore la littérature.
À propos de cette imprégnation littéraire l’artiste déclare : « C’est dans ce sens, je pense, que je me suis retrouvée à explorer la notion de l’intersectionnalité, qui est la manière dont la société peut traiter un individu en rapport avec son sexe, sa race et sa classe sociale. »
À la Bastide de l’oralité, Orakle Ngoy a participé à un des temps forts du CCR appelé PRIMADERAN. Il s’agit d’un temps de restitution mettant à l’honneur plusieurs univers artistiques. Pour cette édition 2023, se sont côtoyés sur scène un groupe de musiciens basques, OREKA TX _ BANDA, qui mettent en valeur la culture basque et font des recherches sur la musicalité des instruments basques emblématiques comme, par exemple, le Txalapata. S’ajoute à leur répertoire de musique traditionnelle des inspirations venues d’ailleurs comme en témoigne leur collaboration avec le collectif HEDO KOLEKTIBOA, un groupe de quatre danseurs guadeloupéens. Ces danseurs constituent le langage corporel de la création sonore, la mettant en mouvement. Quant à Orakle Ngoy, elle a participé à cet événement en proposant une performance textuelle en poésie, slam et rap. Les sujets abordés tournaient autour des notions de l’identité, du sexe, de la race et de la classe sociale.
« Je tiens à insister sur le fait que ça a été une opportunité très importante et intéressante pour ma carrière, pour moi et pour mes projets futurs, que d’avoir pu être lauréate de ce programme Odyssée. J’ai pu y élaborer des travaux que je n’aurais pas eu l’occasion d’élaborer sinon, et j’ai pu ainsi développer une approche toujours plus personnelle de mes travaux artistiques. »
Toujours durant cette première partie de la résidence à Clarenza, elle a mené un atelier slam avec les élèves de l’école privée IMMACULEE, de la bastide Clairance, et elle a aussi pu rencontrer un rappeur de la ville, ODEI.
Une fois en Allemagne, elle a mis à profit son temps de résidence pour développer cette notion de l’intersectionnalité qui lui est chère. Pour ce faire, elle a mené une série d’échanges et de réflexions avec les artistes féministes présentes sur le territoire qui se battent pour des causes précises comme Elise Dacosta qui fait des podcasts en se focalisant sur la communauté des femmes noires et les afro-descendants suisse, Magali Dougoud qui déconstruit les récits historiques et scientifiques dominants pour trouver d’autres subjectivités possibles, elle développe ainsi une imagination féminine émancipatrice, ou encore le collectif Nyabhingi Lab qui tient une fréquence de radio qui donne la parole aux immigrées de Berlin en abordant des positions féministes et le point de vue des migrantes.
« Je vous encourage dans ce programme qui permet aux artistes de toutes nationalités, venant de différentes culture et de différents pays, et donne vie à cette multiculturalité qui est une richesse impressionnante. Ce programme favorise considérablement les rencontres positives. »