Coopération européenne – Exemple de la Chartreuse de Neuville et du Théâtre Potlach/

Coopération européenne – Exemple de la Chartreuse de Neuville et du Théâtre Potlach

Città invisibile

2024

En janvier 2024, l’ACCR, plusieurs membres du réseau des CCR et des partenaires sont partis en mobilité Erasmus+ au Théâtre Potlach, en Italie. Ce séjour apprenant, organisé par l’Abbaye aux Dames, a permis de questionner l’implication des communautés locales dans un projet artistique et culturel. À cette occasion, l’équipe de la Chartreuse de Neuville a rencontré celle du CCR italien.

Lors de cette mobilité, l’envie est née de travailler à la création d’un projet commun entre ces deux CCR, projet qui a pu se concrétiser lors du final des festivités liées aux 700 ans de la Chartreuse de Neuville les 3 et 4 octobre dernier. Découvrez les retours sur expérience de Nathalie Mentha, directrice artistique du Théâtre Potlach et comédienne, et de Pia Galloro, directrice adjointe artistique et culturelle de la Chartreuse de Neuville.

Pia Galloro « Grâce à son label CCR, l’équipe de la Chartreuse de Neuville a pu bénéficier, en janvier 2024, d’un voyage de découverte à Fara Sabina, en Italie, et rencontrer à cette occasion l’équipe du Teatro Potlach et son metteur en scène, Pino di Buduo. Ce centre de sciences théâtrales est situé près de Rome et développe des projets autour de la recherche, de la formation et de l’expérimentation. C’est dans ce cadre que le metteur en scène Pino Di Buduo porte un projet artistique sur le thème de la ville, inspiré du roman d’Italo Calvino, Le città invisibili (Les villes invisibles). Ce dernier compile les descriptions de cinquante-cinq villes imaginaires décrites par Marco Polo à l’empereur Kubilaï Khan.

C’est ainsi que, de fil en aiguille, est né ce projet de grand final pour clôturer les 700 ans de la Chartreuse de Neuville. La Città invisibile fut, comme nous le rêvions, une fabuleuse allégorie de l’histoire et de la mission contemporaine de la Chartreuse de Neuville : œuvrer à une société où chacun cultive le lien à soi, aux autres et au monde, ose entreprendre et contribue à l’avenir.

Un vrai travail de recherche a été accompli pour mêler la mémoire et l’identité de la Chartreuse à l’esprit de ce roman et mener à bien un projet artistique participatif. Les artistes se sont emparés du lieu, de ses archives, de son architecture, des musiques qui l’ont traversé (du chant grégorien à Gabriel Fauré qui y a séjourné du temps du phalanstère d’artistes, entre 1908 et 1912), et de sa mission contemporaine engagée depuis 2008.

Grâce à plusieurs temps de résidence in situ en avril, juin et septembre, plusieurs membres du Teatro Potlach, Pino di Buduo, Nathalie Mentha et Zsofia Guylias, ont pu rencontrer plusieurs artistes amateurs du territoire pour co-construire avec eux le grand final. 78 artistes locaux ont imaginé de courts spectacles vivants, chacun dans leur discipline ; les artistes italiens ont créé des décors, des musiques, des effets sonores et visuels, du théâtre… Ce sont ensuite 18 comédiens, techniciens et coordinateurs du Teatro Potlach qui se sont installés sur le site à partir du 23 septembre pour créer une scénographie tentaculaire pour le grand final participatif des 700 ans, faite de projections, de musiques, de ballons...

Ce sont près de 700 personnes qui ont pu découvrir, émerveillées, lors de deux soirées, la Chartreuse de Neuville revisitée grâce à cette collaboration riche, poétique et surprenante. »

Nathalie Mentha « Tout part des besoins de notre partenaire, un directeur de festival, une fondation, un CCR, qui voit dans notre projet « Les villes invisibles » une opportunité. Une occasion de célébrer un événement important d'une autre manière, un moyen de changer quelque chose... par exemple, la possibilité de relier le monument où notre partenaire vit et travaille, avec les habitants qui entourent ce monument et ceux qui vivent à proximité.

Le montage est un processus d'inspiration, de recherche historique sur le patrimoine matériel et immatériel du site, d'écoute de l'espace et de l'architecture avec lesquels se construit le lieu que nous allons révéler artistiquement. C'est un grand tissage, une transformation de l'espace quotidien qui se construit en 15 jours, par équipes, l'une travaillant le jour et l'autre la nuit.

En Europe, nous commençons généralement 6 à 8 mois avant la date de la représentation. Avec le partenaire, nous organisons au moins deux voyages d'exploration du site et des réunions avec les associations locales. Enfin, la construction finale des « villes invisibles » prend une quinzaine de jours.

Notre expérience à la Chartreuse a été vraiment étonnante en termes d'engagement avec lequel les deux équipes ont travaillé ensemble. Le CCR de la Chartreuse de Neuville et le CCR Théâtre Potlach, les Italiens et les Français ! L'objectif était commun : mettre tout le monde dans les meilleures conditions de travail possibles, comprendre comment résoudre les problèmes et savoir travailler ensemble. S'entraider quand l'une des deux équipes était en difficulté. Parler, échanger des idées et résoudre des problèmes pour pouvoir réaliser le projet avec la qualité requise. Un défi commun aux deux CCR.

Cette initiative a donné lieu à un projet artistique de grande envergure auquel ont participé plus de 70 talents locaux issus de différentes disciplines artistiques et qui a remporté un véritable succès ! »