Serge Antoine (1927 – 2006) était un haut fonctionnaire français, particulièrement déterminant lors de la création des régions administratives. Nommé à la DATAR en 1963, son intérêt pour la décentralisation et le développement à l’échelle régionale ont marqué ses interventions. Serge Antoine a été le président de l’ACCR entre 1985 et 1989.
Dans plusieurs écrits, Serge Antoine est revenu sur le projet des Centres culturels afin d’en présenter les ambitions et d’en justifier la pertinence, avec une question en guise de fil rouge : « Faire de ces lieux des leviers pour demain ? »
Dans « Des monuments qui parlent » (1988), l’énarque insiste sur l’envie populaire de voir différemment les monuments. Ils font certes preuve d’Histoire, de souvenir et d’identité mais cela n’est plus suffisant. Émerge l’envie de voir autrement ces vieilles pierres en leur insufflant un « supplément d’âme », « un nouveau destin dans le monde contemporain », sans pour autant oublier le passé qu’elles incarnent.
« Et puis, il y a la rencontre d’un monument avec un nouveau destin, une nouvelle fonction. »
Les premiers jalons des Centres culturels de rencontre sont posés : ce sont des sites qui font vivre le patrimoine par le réemploi des lieux dans une toute nouvelle fonction. Cette transformation s’opère sans dénaturer le lieu patrimonial en lui-même, il est préservé en tant qu’enveloppe d’exception pour accueillir de toutes nouvelles orientations. Histoire et projet contemporain dialoguent dans une appropriation inédite des lieux.
« L’aventure des Centres culturels est autre : son principe est de faire revivre un lieu en écho à son histoire, par l’exercice, dans ce lieu, d’activités culturelles diversifiées, parfois reliées sur un thème unique et d’y associer, le plus possible, la population régionale et le public des visiteurs dont il est trop vite dit qu’ils sont passifs. »
Serge Antoine définit progressivement les Centres culturels en précisant les contours de ces nouvelles fonctions, en l’occurrence à vocation culturelle. Ces lieux originaux sont envisagés comme des espaces ouverts et accueillants, offrant un rôle actif aux publics. La dimension humaine est ici intrinsèquement liée aux CCR : ils jouent un rôle utilitaire à la fois envers les publics pour leur épanouissement personnel et la libre expression de leur citoyenneté, ainsi que pour les territoires en favorisant leur développement et leur attractivité.
Cette définition est affinée dans « Les Lieux culturels, des ports francs dans un réseau européen pour l’action culturelle ».
(À propos des CCR) « Lieux (contemporains ou anciens) disposant d’une architecture de qualité, aménagés pour la rencontre, l’accueil, la création, et dotés d’une équipe capable, avec des outils (techniques, entre autres, pour la communication), d’investir dans ces fonctions d’animation de manière relativement permanente. »
Au-delà des enjeux à l’échelle régionale, Serge Antoine insiste sur le rôle que peuvent occuper les CCR à une échelle internationale et plus particulièrement européenne. Cette imbrication des échelles devient une des spécificités des CCR : « Jouer résolument et en même temps, l’ancrage territorial et l’ouverture internationale ». Selon lui, les Centres culturels peuvent « lancer ou relancer l’Europe culturelle ».
Si, à l’aube de ses 50 ans, l’ACCR a souhaité revenir sur les temps forts de son histoire, l’objectif premier est surtout de réaffirmer ses engagements de longue date, tout en les intégrant au contexte actuel qui apporte son lot de nouveaux défis. L’ACCR mène une réflexion et s’engage pour vivifier le patrimoine de demain. Cette posture de précurseur était déjà prenante en 1989 dans l’esprit de Serge Antoine.
« Les Centres culturels sont ancrés dans leur territoire, leur région, leur pays. Ils ont les deux pieds dans la terre et la tête dans l’avenir qui se fait. »